Onze jours continus de manifestations un peu partout en Corse, onze jours continus également de tensions majeures entre manifestants et forces de l’ordre. Alors le gouvernement envoie un de ses plus fidèles: Gérald Darmanin, ministre de l’intérieur.
Depuis la tentative d’assassinat contre Yvan Colonna, la Corse brûle et les jeunes militants n’ont pas baissé la garde.
Car c’est bien la jeunesse corse qui tient le premier rôle. Organisatrice de la manifestation de Corté le 6 mars dernier, elle a aussi été à la manoeuvre pour la rencontre entre les représentants des divers groupes nationalistes. A travers les syndicats étudiants et lycéens, elle a même embarqué avec les plus jeunes, les collégiens ont également participé aux actions entreprises par leurs ainés.
Des indélicatesses françaises qui ont renforcé les hostilités
Les bévues françaises ont été nombreuses dans la gestion de la situation. Mais la principale n’a t’elle pas été ce silence de Paris? La stratégie de laisser pourrir la situation en espérant qu’elle allait se tasser n’a pas fonctionné. Celle de lancer des miettes aux Corses non plus. La levée du statut de DPS d’Yvan Colonna a été la goutte d’eau de trop.
Les manifestants, les groupes nationalistes et même au delà tout Corse se sont sentis offensés. Alors quand la même décision est prise 2 jours plus tard pour les 2 membres du commando Erignac, cela semble trop tard. Les Corses poussent encore plus les revendications.
Car comme l’a dit à plusieurs reprises le leader de Core In Fronte, Paul-Félix Bénédetti: “la Corse marque un nouveau tournant dans son histoire”. Les Corses le sentent, ils ont pris le dessus sur l’autorité française. Les attaques contre les bâtiments publics sont des symboles forts.
Le torchon brûle, la France se dit enfin que ça sent le roussi
Après une semaine de quasi silence du gouvernement français, les forces de l’ordre malmenées de plus en plus fortement sur l’île, appellent au secours. Elles préviennent Paris et Marseille que des renforts sont nécessaires. On apprend ces faits par un article du Monde du 14 mars. Les munitions commencent à manquer et les forces vives aussi. Un de ses membres n’hésite pas à indiquer que cela fait 15 ans qu’une situation aussi envenimée n’avait pas été vécue par les gendarmes.
Alors, les voilà obligés d’utiliser les grenades GM2L, les engins les plus dangereux, utilisés seulement lors des situations les plus tendues. Ces grenades peuvent provoquer de très graves blessures. En Corse, en tout cas, les gendarmes ont bien reçu l’ordre de tirer. Ce n’est pas le cas dans les zones de non droit de l’hexagone.
Mais se disant que la situation nécessitait une prise en main ferme, Emmanuel Macron et Jean Castex ont nommé Gérald Darmanin, ministre de l’intérieur, le nouveau “monsieur Corse”.

Ce déplacement va t’il faire retomber la pression? Il n’en est pas certain compte tenu du communiqué de presse de réponse du syndicat étudiant Ghjuventù Indipendentista
Autre fait marquant, hier soir, réuni à Corti le 14/03, il a été décidé que le collectif, dans sa pluralité, sera représenté lors des discussions avec le ministre Darmanin. Le collectif appelle à la poursuite des mobilisations.
Mais il est certain que le tourquennois, comme précisé dans le communiqué de presse sera intéressé de rencontrer Gilles Simeoni, le président de l’exécutif corse. Rappelons que le Canard Enchaîné du 9 mars mettait en avant des accords entre les 2 parties: soutien de Simeoni à Macron au second tour de la présidentielle contre le statut d’autonomie et le rapprochement de 2 prisonniers en Corse. Mais pas seulement: l’objectif est également de mettre définitivement au placard Jean Guy Talamoni, considéré comme trop radical. Cependant, Gilles Simeoni, dès le 2 mars, a pris ses distances avec le pouvoir français.
Le début des auditions de l’administration pénitentiaire
Mais la date du 16 mars n’est pas seulement celle du déplacement du tourquennois. Elle marque aussi le début des auditions des cadres de la pénitentiaire de la centrale d’Arles par des députés. Ils tenteront d’apporter des explications à la tentative de meurtre contre Yvan Colonna.
Tensions, violences, indélicatesses, forces de l’ordre à bout, le déplacement de Gérald Darmanin ne va pas être de tout repos. Sortie de crise ou nouvelle désillusion? Le pessimisme est de mise chez les Corses qui comme beaucoup de Français, sont confrontés à des politiques violents, au consensus inexistant.
Crédit photo: capture twitter
Le miroir du Nord, 2022. Dépêches libres de copie et de diffusion sous réserve de mention et de lien vers la source d’origine